Voici un article pour faire écho à la très bonne idée de Rigolett : parler de ce vrai problème pour le prévenir, ne pas vous laisser imaginer que les professeurs blogueurs sont des supermaitres, et partager quelques trucs que nous avons trouvé pour notre équilibre.
Si l’épuisement professionnel est une réalité dans notre métier, j’y vois plusieurs raisons : tout d’abord le revers de notre liberté pédagogique : si on est libre, on a à inventer chaque journée. Alors bien sûr, on s’appuie sur des outils existants, on picore sur le net, on réutilise des réussites des années précédentes. Mais une petite voix dans notre tête nous dit parfois : Tu aurais pu faire mieux, autrement, toi-même, plus adapté… Et chaque soir il faut se poser les mêmes questions, inventer de nouvelles réponses.
Ensuite le revers de notre perfectionnisme : être enseignant, c’est souvent être exigent… avec soi-même ! Nous nous voulons exemplaires, nous avons une haute opinion de la valeur travail, nous vivons avec cette idée qu’il faut progresser. Toutes ces valeurs, qui font souvent partie de notre culture professionnelle, sont des valeurs nobles et à cultiver… avec raison. Car les plantes envahissantes, même très jolies, finissent par étouffer un jardin.
Il y a aussi trop souvent la solitude professionnelle. Notre métier est encore souvent cantonné entre les 4 murs de notre classe. Quand nous pouvons discuter avec les collègues sans nous sentir jugés, c’est déjà bien. Je suis persuadée pour ma part que nous serions plus efficaces et moins stressés si nous pouvions réellement travailler ensemble. Pas juste échanger ou faire le planning du gymnase. Sortir de notre classe, aller voir dans celle du voisin, échanger sur nos réussites, nos moments difficiles, approfondir un sujet et le partager…
Enfin, ce(ux) qui nous épuise(nt), ce sont aussi les enfants, et il faut le reconnaitre. C’est sûr, nous avons choisi ce métier pour eux, pour les aider, les faire avancer. Mais leur dynamisme, leurs débordements, leurs microbes… sont aussi sources de fatigue et de tensions. Combien de parents j’ai entendus dire au soir d’une sortie où ils nous avaient accompagnés : « Je ne sais pas comment vous faites pour tenir une journée, moi, je ne pourrais pas… ».
Sur ce terreau là, bien des fatigues peuvent apparaitre. La fatigue fait partie du travail, elle n’est pas un mal en soi. Mais il est important de guetter les signes de transformation en épuisement. C’est difficile, cela signifie aussi bien se connaitre, reconnaitre, abandonner l’idée que nous pourrions être superwoman (ou superman). Comme une sorte de renoncement, mais pour aller de l’avant.
A chacun de trouver des recettes, des techniques pour trouver son équilibre, celui qui par définition est vacillant et donc remis sans cesse en question. Je vous partage 3 mini-trucs qui m’aident moi :
- Ne plus travailler pendant la récréation... Bon, c’est un luxe de « grande école », car dans les écoles à une classe, pas moyen de couper à la surveillance. Mais dans ma grande école, quand je ne suis pas de service, c’est pause. Je discute avec les collègues, je prends un café… Les corrections expresses durant la récréation, pressées et jamais terminées à temps, cela me faisait gagner 10 minutes, certes, mais au prix d’une grande tension nerveuse en fin de journée. Ma pause, j’en ai vraiment besoin, je suis comme les enfants.
- Me faire un thé bien réconfortant, chaque matin, dans une tasse thermos. Indispensable pour ma voix, surtout au retour de vacances, mais aussi pour mon moral et mon bien-être. Je suis comme les plantes, j’ai besoin d’arrosage régulier…
- Faire écrire sur le cahier… Finalement, je me suis rendu compte que quand je n’ai pas de fiche, il est parfois très efficace d’écrire les opérations ou les phrases au tableau, même au CP : c’est un très bon exercice de copie, de présentation… Je fais des économies de temps de préparation, de photocopies… C’est parfois si simple que je n’y pensais pas…
Je finis cet article comme nous l’a proposé Rigolett pour lever le voile : comme beaucoup d’entre nous, je ne partage sur ce blog que mes réussites. Comme vous, je teste, je rate, et parfois je réussis. Et alors je partage. Je ne partage pas les ratages, les séances foirées, les séances pas préparées, les journées improvisées, les fiches photocopiées du fichier FFFF ou celles piquées sur le site de SSSS… Je ne partage pas ce qui n’est pas partageable. Je partage peu mes doutes et mes réflexions. Mais cette « vitrine » ne doit pas induire en erreur sur ma vraie vie d’enseignante, pleine d’imperfections et toujours en remise en question !!
Alors, dans ce métier où il n’existe pas de modèle, les professeurs blogueurs n’en sont pas non plus. Si on vous rend service, tant mieux. Si ce partage vous inspire, c’est génial. Mais soyons indulgents. Avec nous-mêmes. Comme on cultive une fragile orchidée, prenons soin de doser nos besoins en eau et en soleil, sachons éviter les courants d’air mortels… Les fleurs ne seront qu’à ce prix.
Prenez soin de vous. C’est de cela aussi dont vos élèves ont besoin.
Et pour aller voir les autres participants, suivez les liens :
|
|||
Ton article me parle beaucoup. Je vais suivre ton conseil et m’interdire de corriger pendant les récréations. Ça me paraît d’un bon sens absolu mais j’ai toujours l’impression que je vais gagner du temps… Alors que je me tue à la tâche !!
Merci ! (Et enchantée, au fait 🙂
Mélimélune, c’est moi qui suis enchantée que tu sois passée par ici… Merci pour ton petit mot.
Et rien ne vaut une bonne pause …
Coucou petite graine. C’est très joliment écrit. C’est très agréable de te lire. Comme toi, je ne corrige jamais sur les temps de récréation. Je suis dans une petite école, j’ai environ deux services sur quatre par jour, mais je sors à chaque fois, j’ai trop besoin de m’aérer.
Coucou!
Merci pour ton article très vrai et très parlant! Moi je tourne au café, mais je commence à me demander si ce petit réconfort n’ajoute pas au final à mon stress… Je vais peut-être passer à la tisane!
Bises pour cette journée!
Pas de thé ou de café par ici, c’est coca party (mauvais pour la santé mais baume au coeur!). Nous sommes une grosse école ( 17 classes) donc « déchargeables » de récréation. Malgré tout, nous mettons en oeuvre ton conseil car nous nous retrouvons tous dehors pour papoter et surveiller. C’est vrai que c’est très sympa!
C’est vrai, le papotage, c’est aussi un très bon anti-stress, je sais bien faire aussi !!
Rigolett, c’était vraiment une bonne idée ce sujet, merci !
Val10, merci pour ta lecture et ton aide sur ce post…
Comme c’est bien dit et bien écrit! Merci Grainesdelivres!
je me reconnais en tous points dans ce que tu dis… merci, ça fait du bien de lire ces lignes. on s’oublie sans s’en rendre compte je crois… je vais essayer de suivre tes conseils de fin d’article et notamment le premier qui est de faire une vraie pause à la récré quand on n’est pas de service, je vais essayer de m’y tenir, je penserai à toi et ton article à ce moment là.
merci pour tout ce travail généreusement partagé, je n’ai pas de blog, que quelques contributions qui font que je me sens moins « parasite » des blogs de collègues comme le tien. je suis admirative du travail et de cette générosité.
sincèrement merci
Merci, merci pour cet article qui me fait du bien !
Merci pour ce très beau partage…
Je ne te cache pas que je me suis inspirée de toi et du texte de base de Rigolett pour rédiger le nôtre.
Au fait, tu as mis des mots très justes sur le fond de notre pensée, petite filleule.
Tu as vraiment un style d’écriture vraiment agréable à lire… Je t’envie.
Gros bisous
Merci pour vos commentaires..
Zazazoune, je me disais en te lisant que tu ne parasites vraiment personne. Nous partageons car nous en avons envie. Un parasite vit aux dépens d’une autre en lui « pompant son énergie ». Lorsque du monde est passé sur mon blog et que certains me remercient, comme toi, ça me redonne de l’énergie… Alors, c’est plus un échange que du parasitisme !!
Madel, je viens d’aller voir ton article, il est très touchant… C’est drôle, car cet AM, j’ai fait un peu de jardin sous le soleil, et je me disais que j’aurai pu réécrire cet article en filant la métaphore du jardin,… et ça m’a fait penser à Zazou. Et en rentrant je trouve Madel et la musique… Du coup j’oscille un peu entre vous deux, un peu de jardin, un peu de musique… voici un bel équilibre… Du coup je vous embrasse toutes les 2 !