Le jeu du « 1 de plus »

Parmi les élèves qui sont en grande difficulté en mathématiques en arrivant au CP, il y a ceux qui n’ont pas encore compris que tout nombre s’obtient en ajoutant un au nombre précédent et que cela correspond à l’ajout d’une unité à la quantité précédente (programmes de maternelle). 

Or, on connait maintenant l’importance pour ces élèves d’utiliser le comptage-dénombrement et non pas le comptage-numérotage. Pour résumer ce concept souvent expliqué en formation d’enseignants de maternelle par Rémi Brissiaud, il est important d’enseigner explicitement l’itération de l’unité, c’est-à-dire le fait de 3, c’est 2 et encore 1… Pour cela, les enseignants de maternelle sont incités à s’appuyer sur différentes façon de faire.

Par exemple, pour montrer à un enfant comment l’on compte pour faire une collection de 5 cubes, l’enseignant déplace le premier cube en verbalisant « un ». Pour continuer, il a deux possibilités pour coordonner le pointage du doigt et la prononciation du mot « deux » :
– Soit il dit « deux » dès le moment où il pose le doigt sur un nouveau cube avant que celui-ci soit déplacé, et l’enfant comprendra qu’il va déplacer un cube qui s’appelle « le deux », le mot « deux » fonctionnant alors comme une sorte de numéro : c’est le comptage-numérotage ;
– soit il ne dit « deux » qu’après que le cube a été déplacéc’est-à-dire après que la collection de deux cubes a été formée, ce qui favorise la compréhension du fait que le mot « deux » désigne une pluralité : c’est le comptage-dénombrement. C’est cette façon de faire qui serait fondamentale pour faire comprendre aux élèves la notion de nombre.

Si les unités sont alignées et non déplaçables, on peut également masquer l’ensemble des unités avec un cache avant de découvrir successivement chacune d’elles tout en explicitant combien d’unités sont visibles après chacun des mouvements du cache, en verbalisant : « 1 point ; et-encore-1, 2 points ; et-encore-1, 3 points ; et-encore-1, 4 points » .

Ce petit détour par la maternelle me semble très utile pour nous aider à comprendre ce qui se joue au cycle 2, et je vous encourage si vous voulez aller plus loin à lire cet article plus complet et précis de Rémi Brissiaud sur le site du café pédagogique. Il me semble très important de poursuivre ce travail au CP, notamment pour les élèves les plus fragiles, et de repérer rapidement ceux avec lesquels il faut continuer de dire et encore 1… voire même de bénéficier de cette information lors de la liaison avec le ou la collègue de GS. Je me suis rendu compte aussi qu’il existe peu de jeux pour travailler cette compétence, alors qu’elle est centrale… donc j’ai réfléchi à la création de quelques cartes pour un jeu très simple à mettre en oeuvre.

Pour continuer ce travail avec les nombres de 1 à 10 pour nos élèves qui en ont encore besoin, voici deux jeux différenciés à imprimer, l’un sur les plus petits nombres, avec des animaux, qui pourrait servir dès la maternelle, et l’autre sur les nombres jusqu’à 10, avec des végétaux, qui pourrait être utilisé déjà en GS. Le jeu consiste pour l’enfant à tirer une carte, puis à l’associer avec la carte sur laquelle la collection contient 1 de plus. S’il trouve, il gagne la paire. Les enfants peuvent y jouer à plusieurs ou seuls, un peu comme une réussite.

Le jeu propose d’abord un premier niveau avec des alignements, ce qui rend la comparaison plus facile visuellement, et peut permettre la validation par rapprochement des cartes :

Un deuxième niveau propose des collections organisées de manières différentes, ce qui incite l’enfant à utiliser les nombres :

Enfin, un troisième niveau propose des collections d’objets de taille différente, ce qui oblige les élèves à inhiber leur appréciation visuelle de la surface occupée par les objets pour ne travailler que sur le domaine numérique :

On vise ainsi deux compétences essentielles de fin de GS, et donc de début de cycle 2 :

Avoir compris que le cardinal ne change pas si on modifie la disposition spatiale ou la nature des éléments, car les éléments ne sont jamais de même nature (même si le thème est le même), et ne sont pas toujours de même taille.

Avoir compris que tout nombre s’obtient en ajoutant un au nombre précédent et que cela correspond à l’ajout d’une unité à la quantité précédente, car l’élève va comprendre qu’il devient efficace s’il utilise directement « le nombre d’après ».

Je pense qu’il faut vraiment être attentif à ne pas parler dans la consigne du nombre d’après, mais de rester sur l’aspect cardinal du nombre, en parlant de la collection qui en contient 1 de plus. Par contre, si les enfants font le lien, il est important de le valider et de leur faire verbaliser. Enfin, d’autres compétences mathématiques entrent en jeu pour la réussite de la tâche : le dénombrement de petites collections, la reconnaissance globale de collections organisées (subitizing), la connaissance de la comptine numérique… mais elles n’en constituent pas l’objectif principal d’apprentissage.

Voici donc le fichier à imprimer, sur des feuilles de couleur pour plus de visibilité. Il contient les 2 jeux de 4 planches de 16 cartes, à utiliser de façon progressive, ainsi que les règles du jeu et les variables que j’ai pu anticiper.

Pour conclure, je trouve souvent super intéressant que les jeux utilisés circulent entre la maternelle et le CP, et je me dis que ce jeu pourrait servir déjà en GS, puis être repris en début de CP, pour faire du lien, montrer que ce qu’on fait au CP n’est pas étranger à tout ce qu’on a appris avant, en utilisant le matériel mais surtout le même langage autour du nombre, et notamment ce « et encore 1 ». On continue le travail amorcé par les collègues de maternelle quand les enfants n’ont pas encore acquis cette compétence, et on les aide à remobiliser leur début d’apprentissage. Et si en plus les enfants connaissent déjà les règles, on peut l’utiliser dans un atelier autonome dès le début d’année.

Comments

comments

14 thoughts on “Le jeu du « 1 de plus »

  1. J’ai fait ça avec mes MS. Des oursons… on en pioche un nombre jusque 5 et le copain d’à côté doit en mettre un de plus… C’est difficile au départ puis avec la manip des oursons et la correction collégiale on avance… mais c’est vrai que cette notion est primordiale. Merci tout plein pour les cartes, je vais adapter pour mes loupiots!

    1. Coucou Dom, tu as raison, on peut commencer dès la MS avec les premiers nombres… et en maternelle, on prend son temps, et on commence avec des objets déplaçables. Mais c’est une notion parfois bien longue à s’installer ! Bises de loin…

  2. J’ai fait mon mémoire sur la décomposition-recomposition en MS, fortement appuyé sur les écrits de Brissiaud, c’était passionnant à faire en classe et (presque) passionnant à écrire !
    Cette année j’ai eu des CP, CE1, dont une CE1 qui n’avait toujours pas compris qu’on ajoutait un, ça ne faisait aucun sens pour elle… Logiquement les nouvelles recommandations pédagogiques en maths en maternelle devraient aider pour les années à venir, si tenté est que les enseignants se penchent dessus car c’est quand même une manière différente d’appréhender le nombre.

    Merci pour ce support en tous cas !

    1. Merci pour ce retour. En effet, cette notion commence à être de mieux en mieux connue par les collègues de maternelle et leurs outils, qui oeuvrent en ce sens… Après, cela ne règlera jamais toutes les difficultés, et certains élèves auront besoin d’une aide plus approfondie et plus longue pour avancer… c’est pourquoi il est nécessaire que les enseignants d’élémentaires connaissent aussi ce point de didactique et agissent dans le prolongement… Ce petit support sans prétention a aussi cet objectif.

  3. Bonjour, merci pour ce partage de matériel et de connaissance ! Je vais pouvoir utiliser ce jeu en APC pour mes quelques élèves de GS qui en ont besoin.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.